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LA DECOUVERTE DU TOMBEAU DE TOUTANKHAMON

Il y a un peu plus d’un siècle, en novembre 1922, l’anglais Howard Carter révélait l’existence du tombeau de Toutankhamon dans la Vallée des Rois, en Egypte, un pharaon du Nouvel Empire (1335-1327 av. J.C) mort à l’âge de 19 ans, inhumé au milieu d’un trésor éblouissant d’objets précieux et de joyaux !

1 – Toutânkhamon, l’enfant-roi

Né vers 1342 av. J.-C., Toutânkhamon descend de deux illustres pharaons : Amenhotep III et Amenhotep IV, plus connu sous le nom d’Akhenaton.

Amenhotep III a régné sur l’Égypte pendant près de quatre décennies au plus fort de la 18e dynastie, alors qu’Akhenaton a radicalement remodelé la religion et l’art égyptiens en rejetant les anciens dieux et en plaçant l’Égypte sous la protection d’une seule divinité, Aton, le dieu solaire

Alors qu’il est jeune souverain, Aménophis IV – le nom de naissance d’Akhénaton – mène une importante réforme pour transformer la religion égyptienne, historiquement panthéiste et polythéiste, en culte d’un dieu unique, Aton, le disque solaire. Ce faisant, il réduit le clergé égyptien à néant. Il fait bâtir, à 300km au nord de Louxor, sa propre capitale qu’il baptise Akhétaton (Amarna), qui signifie « l’horizon d’Aton » en égyptien, car c’est là le point d’apparition du soleil sur Terre. Il va ainsi bouleverser la Maât, c’est-à-dire la mission confiée par les dieux aux pharaons de faire respecter le principe d’ordre, de vie et de vérité. La Maât, c’est aussi le culte que le pharaon rend aux Dieux qui, en échange, assurent sa prospérité et celle de la population. Si le règne d’Akhénaton, qui dure environ 15 ans, est considéré en partie comme une révolution religieuse et culturelle de l’Antiquité, il s’achève tragiquement avec un État en faillite, un royaume touché par une épidémie de peste et soumis à des défaites militaires.

À la mort d’Akhénaton, sa fille Mérytaton, la demi-sœur aînée de Toutânkhamon, lui succède pendant environ trois ans. Elle amorce, jusqu’à la nomination de son jeune frère, la rupture avec la réforme menée par leur père et restaure le culte traditionnel du dieu Amon et l’ordre de la Maât.

Le jeune Toutânkhamon âgé de 9 ans devient roi. Rentré à Thèbes, Toutânkhamon entame la transformation du pays avec l’aide de l’ambitieux général Horemheb. Alors que ce dernier n’a pas d’origine royale, il connait une formidable ascension au sein de la cour. Après le décès prématuré de Toutânkhamon vers 1323 av. J.-C. à l’âge de 15-16 ans, il parvient, avec l’aide du clergé égyptien, à évincer son successeur Aÿ.

Une fois au pouvoir, Horemheb entreprend d’effacer toute trace du règne de l’hérétique Akhenaton, mais aussi de sa descendance. Cette sanction se traduit par la destruction de chaque image et monument à leur nom, mais également par leur suppression des listes officielles de archives de la monarchie. Car dans la tradition de l’Égypte antique, l’effacement du nom condamne à l’oubli et anéantit toute espérance de vie après la mort.

L’entrée de la tombe de Toutânkhamon sera recouverte des déblais engendrés par le creusement des tombeaux ultérieurs, la rendant invisible aux pillards. Cet oubli infligé à Toutânkhamon aura ainsi permis de préserver son trésor funéraire.

2 – Howard Carter

Né en 1874, à Londres, Howard Carter était le fils d’un peintre estimé mais peu fortuné, et le dernier d’une fratrie de 11 frères et soeurs. Il meurt à Londres en 1939, à l’âge de 64 ans.

Suivant les traces de son père, Howard montra rapidement un talent naturel pour le dessin et la peinture. Grâce à des relations familiales, à l’âge de 17 ans, il fut recommandé à Percy Newberry, un égyptologue de renom qui cherchait un artiste pour une expédition archéologique en Égypte. Après un apprentissage de trois mois au British Museum, Carter partit pour le Nil, où il travailla sur une grande excavation à Amarna, site archéologique d’Akhenaton.

Il devient inspecteur au Département des antiquités égyptiennes et finit par devenir inspecteur en chef pour le nord de l’Égypte. Au début des années 1900, il travaillait pour l’enthousiaste Theodore M. Davis dans la Vallée des Rois.

En 1907, Lord Carnarvon, collectionneur de voitures de course et de chevaux, commence à financer les recherches de Carter. La concession qu’ils souhaitaient explorer dans la vallée était tenue par Theodore Davis. Le travail de Davis avait permis la mise au jour de plusieurs artefacts qui intriguaient Carter, notamment des outils servant au rituel d’embaumement, comme du linge et d’autres artefacts portant le sceau de Toutânkhamon. Carter les interpréta comme des signes que le tombeau de Toutânkhamon pouvait se trouver non loin de là. Davis étant convaincu qu’il n’y avait là plus rien à trouver, il leur a cédé la concession.
Malheureusement, le permis d’excavation fut accordé en 1914, et le début de la Première Guerre mondiale retarda l’excavation. Les recherches ne reprirent qu’en 1917.

En 1922, Lord Carnarvon, frustré du peu de résultats, informa Carter qu’il ne continuerait pas à financer l’expédition. Carter l’a convaincu malgré tout de lui laisser encore une année pour mener à bien ses recherches. Le 1er novembre 1922, Carter a recommencé à creuser dans la Vallée des Rois.

Le 4 novembre, ils ont mis au jour l’escalier qui menait au tombeau intact de Toutânkhamon.

3 – Le tombeau de Toutânkhamon

Le tombeau de Toutânkhamon se trouvait non loin du centre de la vallée des Rois, cimetière peuplé de pharaons situé à l’ouest de la ville de Thèbes. À l’inverse des pyramides, qui trahissaient la présence de trésors inouïs, ces tombeaux étaient souvent recouverts pour empêcher les pillards de les trouver. Le tombeau de Toutânkhamon fut en fin de compte découvert sous plus de 150 000 tonnes de roche et sous les débris d’un tombeau qui avait été creusé à flanc de colline juste au-dessus du sien.

Le 4 novembre 1922, Hussein, un jeune porteur d’eau, plante dans le sable les jarres servant à désaltérer les ouvriers du chantier de fouilles. En creusant à la hâte, il tombe sur ce qui ressemble à une marche. Dès le lendemain, Howard Carter déblaie la pierre et dégage un escalier de 16 marches s’enfonçant quatre mètres sous terre. Il mène à une porte scellée. Immédiatement, Carter ordonne à ses travailleurs de reboucher le trou et prévient Lord Carnarvon : « Avons enfin fait une merveilleuse découverte : une magnifique tombe avec sceaux intacts. L’avons refermée jusqu’à votre arrivée. Félicitations. ». Après 15 jours de voyage, l’aristocrate accoste à Louxor le 24 novembre.

Le 25 novembre, les marches sont à nouveau dégagées et la porte débloquée à coups de barre à mine. Le lendemain, une seconde porte apparaît au fond d’un corridor, frappée de sceaux d’argile au nom de Toutânkhamon. Ils ont trouvé la tombe de l’enfant-roi !

Le jour même, l’équipe procède à l’ouverture du tombeau. Ils commencent par percer un petit trou dans la porte. Juste de quoi jeter un œil à la lueur d’une bougie. Carter obtient le premier coup d’œil. « Pouvez-vous voir quelque chose ? », demande un observateur, impatient de voir ce qui se cache derrière la porte. « Des merveilles. Tout simplement des merveilles ! », répond l’archéologue. La grandeur de ce que le tombeau renferme dépasse toutes ses attentes.

Après avoir agrandi l’ouverture dans la porte, les quatre Britanniques pénètrent dans une première salle qui sera désignée comme l’antichambre. Une fois acclimatés à la pénombre, ils découvrent une pièce partiellement en désordre, comme si des objets volés y avaient été redéposés. Mais aussi des lits funéraires dorés à tête d’animaux, deux statues grandeur nature coiffées du Cobra sacré se faisant face, telles des sentinelles, des chars en pièces détachées, des chaises, un trône en or, des vases pour onguents en albâtre, des coffres contenant des vêtements en lin et une multitude d’objets précieusement décorés. Une fois l’électricité installée, Carter et Callender fouillent chaque recoin et trouvent une seconde pièce plus petite, l’annexe, elle aussi remplie d’une profusion d’objets précieux et de meubles entassés les uns sur les autres. Mais pas de momie.

Le 28 novembre, avec l’aide des ouvriers égyptiens, les Britanniques ouvrent une brèche dans le mur situé entre les deux sentinelles et découvrent cette fois une pièce aux murs peints dont la quasi-totalité de l’espace est occupée par un immense coffre en bois finement ciselé d’or : la chambre funéraire. Il faudra près de trois années pour démonter les quatre chapelles et trois sarcophages qui, emboîtés tels des poupées russes, abritent la momie du jeune Toutânkhamon qui repose dans un cercueil d’or massif de 110kg, coiffé d’un somptueux masque funéraire en or incrusté de lapis-lazuli et de pierres semi-précieuses.

Le 29 novembre marque ainsi la date de l’ouverture officielle du tombeau en présence de notables égyptiens. Carter et Lord Carnarvon recrutent une équipe de spécialistes pour participer à l’exploitation de la découverte.

Il faudra plus de 10 années pour extraire et inventorier la totalité des quelque 5000 pièces du tombeau – dont plus de 2000 objets de bijouterie et d’orfèvrerie – qui permettront de mieux connaitre l’histoire de la vie royale et de la vie quotidienne de l’époque.

4 – Le trésor de Toutankhamon

Composé de quatre petites pièces (une antichambre, une annexe, la chambre funéraire et la chambre du trésor), le tombeau abrite un nombre inimaginable d’objets : en tout, 5 398 pièces, dont près de 2 000 bijoux et accessoires d’apparat, sont retrouvées.

Dans la seule pièce décorée du tombeau, le sarcophage royal, la momie du pharaon et son masque funéraire sont entourés d’imposantes chapelles en bois doré. Chars, coffres, vases canopes, lits, boîtes, objets rituels… La tombe regorge de splendeurs, glissées là, pêle-mêle, il y a 30 siècles.

Presque intact, le tombeau a offert un aperçu inégalé de cet instant de l’histoire égyptien. Chars, armes, vêtements et œuvres d’art y reflètent la façon dont on faisait la guerre et révèlent l’identité de ceux que l’Égypte considérait comme ses ennemis. Des fresques murales illustrent des croyances religieuses, et notamment le rétablissement du culte d’Amon, que le prédécesseur de Toutânkhamon avait révoqué. Les sarcophages intacts permirent également aux archéologues de mieux comprendre les rituels funéraires complexes qui avaient cours.

L’Egypte obtient son indépendance en 1936 mais c’est seulement en 1953 qu’un Egyptien est nommé à la tête du Service des Antiquités. Le trésor est quant à lui toujours conservé au Musée du Caire (jusqu’à son déménagement au Grand Egyptian museum). Contrairement à de nombreux autres artefacts découverts en Égypte, les trésors du tombeau de Toutânkhamon n’ont pas quitté le pays.

Le masque funéraire de Toutânkhamon

Véritable chef-d’œuvre de l’orfèvrerie égyptienne, le masque pèse un peu plus de 10 kg et mesure environ 50 cm de haut, 40 cm de large et 50 cm de profondeur. Il est constitué de deux plaques d’or assemblées ornées de nombreuses pierres semi-précieuses 

La dague en fer météoritique

Il s’agit d’une dague avec une lame en fer et un manchon en or orné de pierres précieuses. Si elle a retenu l’attention des spécialistes, c’est qu’à l’époque du règne de Toutânkhamon, le travail du fer ne s’était pas encore développé en Egypte. Plus étonnant, l’analyse de sa composition a indiqué que son métal n’était pas d’origine terrestre, il serait issu d’une météorite de fer

Le mannequin de Toutânkhamon

La tombe contenait plusieurs représentations du pharaon dont la particularité résiderait dans sa fonction.

Howard Carter a émis l’hypothèse qu’il pourrait s’agir d’une sorte de mannequin, un modèle en taille réelle qui était utilisé pour porter ou essayer les vêtements et bijoux de Toutânkhamon.

Une paire de trompettes

L’une est faite d’argent et mesure une cinquantaine de centimètres de long. L’autre est fabriquée en bronze et est un peu plus courte. Mais elles sont toutes deux gravées d’images de dieux tels qu’Amon et Ra. Ces pièces sont les seuls exemples connus de l’Egypte antique et elles sont considérées comme les plus anciennes trompettes fonctionnelles connues à ce jour.

Le sanctuaire d’Anubis

Anubis est l’un des dieux les plus rencontrés dans les sépultures de l’Egypte antique. L’animal, en position couchée, est sculpté dans du bois peint en noir, orné d’or au niveau des oreilles notamment et doté de griffes en argent. Il se trouvait sur le toit d’un sanctuaire apparu à proximité de la chambre funéraire

Le trône de Toutânkhamon

Particulièrement luxueux, il est fait de bois et est recouvert d’or et d’argent. Il est orné de pierres semi-précieuses et de verre coloré. Deux têtes de lion protègent les extrémités des accoudoirs prenant la forme de serpents ailés et coiffés de la double couronne des pharaons. Le dossier abrite une représentation de Toutânkhamon et de son épouse Ankhésenamon. 

5 – La malédiction de Toutankhamon

Près de 5 500 objets entassés il y a plus de 30 siècles pour accompagner un jeune pharaon dans l’autre monde entourent le sarcophage doré de Toutankhamon.

Fascinés par le masque funéraire de 10 kg d’or, les archéologues auront peu d’égard pour la momie, dont le crâne sera détruit après que ce masque a été arraché.

Peu de temps après la découverte du tombeau, l’équipe ayant exhumé Toutankhamon et son extraordinaire trésor funéraire est frappée de maux étranges. Les morts se succèdent…

Le premier à succomber: Lord Carnarvon. De santé fragile, il meurt de piqûres de moustiques qui se seraient infectées un an après la découverte du tombeau. Un homme d’affaires qui visite la tombe décède brutalement, ainsi qu’un radiologiste qui examine la momie.

Au fil des semaines et jusqu’à Howard Carter (64 ans) en 1939, 27 personnes perdent la vie. Il n’en faut donc pas plus pour que l’on attribue ces décès à la vengeance de Toutankhamon. La légende de la malédiction est née.

 

 

 

       
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